Il est des textes pour obsèques qui portent en eux un caractère méditatif fort (Max-Pol Fouchet, François Cheng, Khalil Gibran), d’autres davantage imagés (Marguerite Yourcenar, Alfred de Vigny), d’autres encore esquissés de mémoire (poème de Messénie) ou d’espérance (L'absent par Eillen Cicoli, Paul Éluard).
Nos propositions de textes ont unique vocation à être un réservoir de réconfort mis à votre disposition. Ils sont une matière vivante.
Max-Pol Fouchet in "Demeure le secret"
"L’absent" par David Harkins traduit de l'anglais par Eileen Cicoli
François Cheng in "Cinq méditations sur la mort"
Marguerite Yourcenar in "Les charités d'Alcippe"
Poème grec de Messénie - esquissé de mémoire
« Espérance », prière par Mgr Bougaud
"Paul Éluard, « La nuit n’est jamais complète »
Max-Pol Fouchet in "Demeure le secret"
Retrouverons-nous sur l'arbre
Une feuille d'ombre danseuse
Près du fruit de lumière mûrissant
Dans l'oubli de toute mort
Retrouverons-nous sur l'arbre
Le goût des départs au matin
Et sur nos lèvres la vie
Dans l'oubli de toute mort
Il nous faut une feuille d'ombre
Sa caresse au fruit de lumière
Et pour éclairer notre vie
Cette ombre que nous sommes
Sera-t-il plus loin encore
L'homme qui dévorait la pluie
Et qui s'en fut avec son chien
Dans les plis du chemin
Retrouverons-nous sur l'arbre
Une feuille d'ombre un fruit de lumière
Mais retrouverons-nous l'arbre
De l'oubli de toute mort ?
David Harkins, "L'absent" traduit de l'anglais par Eileen Cicoli
Vous pouvez sourire parce qu’il a vécu.
Vous pouvez ouvrir les yeux et voir ce qu’il nous laisse.
Il peut être plein de l’amour que vous avez partagé.
Vous pouvez être heureux demain parce qu’il y a eu hier.
Vous pouvez chérir ce souvenir et le laisser vivre.
Vous pouvez faire ce qu’il aurait voulu:
Sourire, ouvrir les yeux, aimer et continuer.
François Cheng in "Cinq méditations sur la mort"
La mort n'est point notre issue,
Car plus grand que nous
Est notre désir, lequel rejoint
Celui du Commencement,
Désir de Vie.
La mort n'est point notre issue,
Mais elle rend unique tout d'ici :
Ces rosées qui ouvrent les fleurs du jour,
Ce coup de soleil qui sublime le paysage,
Cette fulgurance d'un regard croisé,
Et la flamboyance d'un automne tardif,
Ce parfum qui nous assaille et qui passe,
insaisi,
Ces murmures qui ressuscitent les mots natifs,
Ces heures irradiées de vivats, d'alléluias,
Ces heures envahies de silence, d'absence,
Cette soif qui jamais ne sera étanchée,
Et la faim qui n'a pour terme que l'infini...
Fidèle compagne, la mort nous contraint
À creuser sans cesse en nous
Pour y loger songe et mémoire,
À toujours creuser en nous
Le tunnel qui mène à l'air libre.
Elle n'est point notre issue.
Posant la limite,
Elle nous signifie l'extrême
Exigence de la Vie,
Celle qui donne, élève,
Déborde et dépasse.
Marguerite Yourcenar in "Les charités d'Alcippe"
Voici que le silence a les seules paroles
Qu’on puisse, près de vous, dire sans vous blesser ;
Laissons pleuvoir sur vous les larmes des corolles ;
Il ne faut que sourire à ce qui doit passer.
À l’heure où fatigués nous déposons nos rôles,
Au même lit secret les dormeurs vont glisser ;
Par chaque doigt tremblant des herbes qui nous frôlent,
Vous pouvez me bénir et moi vous caresser.
C’est à votre douceur que mon sentier m’amène.
De ce sol lentement imprégné d’âme humaine,
L’oubli, lent jardinier, extirpe les remords.
L’impérissable amour erre de veine en veine ;
Je ne veux pas troubler par une plainte vaine
L’éternel rendez-vous de la terre et des morts.
Poème grec de Messénie - esquissé de mémoire
Si j’avais su que tu allais mourir,
Je serais allé à Mystra, à Paximadi,
J’aurais taillé du marbre, j’aurais coupé un cyprès,
Je t’aurais fait un cercueil solide en bois de cyprès,
J’aurais laissé une fenêtre sur le côté droit
Pour que le soleil entre à l’aube, et la fraîcheur l’après-midi,
Et que puisse aller et venir l’oiseau t’apportant les nouvelles.
"Espérance", prière par Mgr Bougaud
La grande et triste erreur de quelques-uns, même bons, c’est de s’imaginer que ceux que la mort emporte nous quittent. Ils ne nous quittent pas. Ils restent. Où sont-ils ? Dans l’ombre ? Oh non, c’est nous qui sommes dans l’ombre. Eux sont à côté de nous sous le voile, plus présents que jamais. Nous ne les voyons pas parce que le nuage obscur nous enveloppe, mais eux nous voient. Ils tiennent leurs beaux yeux pleins de gloire arrêtés sur nos yeux pleins de larmes. Ô consolation ineffable, les morts sont des invisibles, ce ne sont pas des absents. J’ai souvent pensé à ce qui pourrait le mieux consoler ceux qui pleurent. Le voici : c’est la foi à cette présence réelle et ininterrompue de nos morts chéris. C’est l’intuition claire, pénétrante que par la mort ils ne sont ni éteints, ni éloignés, ni même absents, mais vivants, près de nous, heureux, transfigurés, et n’ayant perdu dans ce changement glorieux ni une délicatesse de leur âme, ni une tendresse de leur cœur, ni une préférence de leur amour, ayant au contraire, dans ces profonds et doux sentiments, grandi de cent coudées. La mort pour les bons est la montée éblouissante dans la lumière, dans la puissance et dans l’amour. Ceux qui jusque-là n’étaient que des chrétiens ordinaires, deviennent parfaits : ceux qui n’étaient que beaux deviennent bons ceux qui étaient bons deviennent sublimes!
Paul Éluard, "La nuit n’est jamais complète"
La nuit n’est jamais complète.
Il y a toujours puisque je le dis,
Puisque je l’affirme,
Au bout du chagrin,
une fenêtre ouverte,
une fenêtre éclairée.
Il y a toujours un rêve qui veille,
désir à combler,
faim à satisfaire,
un cœur généreux,
une main tendue,
une main ouverte,
des yeux attentifs,
une vie : la vie à se partager.
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