Cérémonie

XXmin

Y a-t-il un âge pour assister à une crémation ou un enterrement ?

Enterrement : à partir de quel âge un enfant peut-il y assister ?

Hélène Romano : Si les parents se sentent la force d’accompagner leur enfant, qu’ils lui ont expliqué le déroulement de la cérémonie et qu’ils pourront répondre à ses questions pendant l’enterrement, il n’y a pas de contre-indication.

Les enfants de tout âge, y compris des bébés, peuvent être présents aux funérailles si des adultes sont prévus auprès d’eux pour s’en occuper.

Un enfant de 7-8 ans dont les proches ont préféré ne pas le faire participer aux funérailles et qui, pendant la cérémonie, a fait un foot avec des copains et qui, en rentrant chez lui, voit tout le monde en noir et en larmes, peut mal le vivre si on ne lui en a pas parlé en amont. Ce n’est pas traumatique quand c’est expliqué.
L'objectif des funérailles, au-delà de la question religieuse, est de dire qu’on est ensemble face à la mort et qu’on peut compter les uns sur les autres.
On peut lui expliquer :
« C'est triste parce que Papi, Mamie ou Papa, ne sera plus là, mais toujours dans nos cœurs, et il faut prendre soin de lui ou d’elle, et de sa mémoire. »

L’enterrement est un moyen pour l’enfant de dire au revoir.

Un enfant peut-il participer aux rituels de la cérémonie ?

Hélène Romano : Ses parents peuvent lui proposer de participer, mais sans le forcer. Certains enfants déposent des dessins, des fleurs, des bougies... Mais si les adultes sont effondrés et que l’enfant a envie d'aller faire un bisou au cercueil et qu’il va se faire gronder, autant qu’il ne vienne pas ! Il peut alors être représenté par une photo dans le cercueil ou une petite bougie qui le symbolise.

Y a-t-il un âge pour assister à une crémation ?

Hélène Romano : La crémation, qui a longtemps été extrêmement rare dans notre pays, est de plus en plus fréquente. Les modalités de cérémonie évoluent et deviennent plus humaines, mais elles restent extrêmement variables.
Il est important pour la famille de préparer cette cérémonie avec les services funéraires pour qu'elle corresponde à ce qu'elle souhaite (ou ce que souhaitait le défunt s’il a laissé des consignes).

Dans le cadre d’un hommage, les enfants de tout âge peuvent être présents pour entendre parler du défunt – avec des anecdotes, des souvenirs heureux, des compliments...

Certaines fois, des musiques ou des diaporamas sont diffusés… tout est possible. Si les enfants sont trop jeunes, ces cérémonies peuvent être filmées et rediffusées plus tard. 

Comment parler des cendres à un enfant ?

Il faut leur expliquer que, quand on est mort, le corps ne respire plus, ne souffre plus et qu’il va se transformer.

On peut dire :
« La peau ne sert plus, donc elle va se transformer petit à petit, on appelle ça se décomposer. Après, il n’y a plus que les os qui disparaissent, mais cela met très très très très longtemps à disparaître. Si on est mis dans la terre, ça s'appelle l'inhumation : on met la personne dans une grande boîte qu'on appelle un cercueil, à un endroit qu'on appelle le cimetière. »  

Et pour parler de la crémation aux enfants :
« Quand la personne est morte, le cœur est arrêté, elle ne souffre pas. La transformation, on va la faire plus vite et, pour ça, on va mettre le corps de la personne dans un endroit qui s'appelle le crématorium où il va être brûlé, transformé tout de suite en poussière d'os. Après, on va mettre cette poussière dans une petite boîte, qu’on appelle une urne. »

Ce n’est pas traumatique pour l’enfant d’expliquer les choses ainsi. Ce qui l’est, c'est de diviser les urnes. Bien que la loi Sueur de 2008 interdit de séparer les cendres, il est de plus en plus fréquent que des parents d’un enfant décédé demandent deux urnes parce qu’ils sont séparés. Pour la fratrie, c’est traumatogène : l'unité du corps est très importante.
Je recommande aussi de ne pas garder les cendres à la maison. C’est inscrit dans la culture des personnes de confession bouddhiste où, dans toutes les familles, on trouve un petit autel avec les anciens, une bougie, des photos et parfois des cendres.

Dans notre culture occidentale judéo-chrétienne, ça ne l'est pas. Mais certains gardent les cendres chez eux, même s’ils n’en ont pas le droit (NDLR : la loi Sueur tolère de les garder seulement le temps d’organiser leur destination finale). Quand un enfant ouvre la porte d’un placard ou d’une armoire, aperçoit une urne, demande de quoi il s’agit et qu’on lui répond : « C’est Papi ! », c’est violent.

Un enfant peut-il assister à la dispersion des cendres ?  

Quand on disperse les cendres, il faut que ce soit dans un endroit qui ait du sens pour l’enfant, mais aussi pour les endeuillés, où ils puissent s'y retrouver.

Hélène Romano : Je me souviens d’un petit garçon qui ne voulait plus se baigner et avait développé une phobie de l’eau. Il m’a dit qu’il avait peur d’avaler la tasse car il avait peur d’avaler son papa... Encore une fois, il faut parler, expliquer. C’est pourquoi il est nécessaire d'aborder le sujet de la mort avant qu’elle survienne.

A quel âge peut-on voir un mort ?

Hélène Romano : Il y a plusieurs générations, les enfants, même très jeunes, assistaient aux cérémonies funéraires et voyaient le corps du défunt. Il n'y avait rien de morbide, rien de traumatique, car l'ensemble de la communauté familiale était présente auprès de l'enfant.
Aujourd’hui, avec la médicalisation extrême de la mort, la montée de l'individualisme et cette idée qu'il faut tout faire très vite, la place des enfants devient presque problématique alors qu'elle est essentielle pour leur processus de deuil. 

Il ne s'agit pas d'obliger l'enfant à voir son défunt, mais de lui demander s'il souhaite voir une dernière fois sa Maman, son Papa, son Papi ou sa Mamie… parce qu’après, cela ne sera plus possible.

Et s'il le demande (il peut le demander très jeune), il faut à ce moment-là pouvoir l'accompagner. Bien des parents qui ont un bébé hésitent à venir voir le corps avec lui, tout simplement parce qu'ils sont submergés de tristesse, que le bébé s'agite car il ressent qu’ils sont moins disponibles, qu'il se met à pleurer et que ce n'est plus gérable.

Si le bébé n'est pas présent, il sera toujours possible plus tard de lui expliquer les raisons pour lesquelles ses proches ont préféré ne pas l'amener et répondre aux questions qu'il pourrait poser autour du corps, de la façon dont on a pris soin de lui (comment, par exemple, il était habillé).

Si un enfant plus âgé souhaite voir le corps, il est indispensable qu'un adulte lui décrive la situation avant, afin qu’il ne soit pas trop surpris et qu'il puisse avoir un minimum d'éléments pour se la représenter.  

Par exemple :
« Mamie est allongée, c'est comme si elle dormait mais elle ne dort pas, elle ne souffre plus. On lui a mis la grande robe rose qu’elle aimait tant ; elle est un peu maquillée mais tu verras quelle n'est pas comme d'habitude parce que, quand on est mort, le sang ne circule plus. Le corps s'arrête de vivre et comme il s’arrête de vivre, il se transforme : le corps est tout froid, plus maigre, le visage est plus tiré… »

C'est important d'accompagner l’enfant et de ne pas le laisser tout seul face au mort. Il y a des enfants qui ont besoin de toucher. Si la personne est décédée il n’y a pas trop longtemps, c’est possible, mais il faut le prévenir : « C’est froid, ça va te faire bizarre. »  

Comment associer un enfant à la cérémonie s’il n’y assiste pas ?

Hélène Romano : Si l’enfant n’est pas présent, parce que les parents ne se sentent pas prêts à l’accompagner, ou qu’ils ont souhaité le protéger lors d’un deuil médiatisé, il est nécessaire de l’associer à la cérémonie. C’est important pour qu’il ne reproche pas à ses proches – parfois des années après – de ne pas avoir été présent ce jour-là.
Il est donc essentiel de représenter symboliquement l'enfant auprès de la personne décédée.
On peut l’aider à préparer une boîte à souvenirs qu’on déposera dans le cercueil. S’il est tout petit, on peut ajouter une photo de lui, son petit bracelet ou un petit doudou pour le représenter.

Hélène Romano est l’autrice, entre autres ouvrages, de « Consoler nos enfants » (Leduc) et « Dis, c’est comment quand on est mort ? » (La Pensée sauvage).


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